AU BORD D’UNE RIVIÈRE

11h51, Le 08/03/22

Voilà, Je suis enfin parti, il y a une petite semaine déjà. Je ne sais plus exactement quel jour, c’est sans importance. Après quelques jours avec mon frère, à SAINT MEDARD EN JALLES, j’ai pris la route en direction d’ASCAIN pour passer voir un ami avec qui j’ai étudié à SAINT LUC DE TOURNAI.


Simplement, j’ai roulé, j’ai dormi dans ma voiture, j’ai marché, j’ai reconquis une solitude échappée. C’est un soulagement. En réalité, les nombreuses émotions qui me traversent, chaque jour au volant, pendant que je déjeune, je dessine ou lis un livre, m’interpellent.


Mon corps s’allège, se détend. C’est simple et sans angoisses. Les tâches à effectuer sont importantes, mais plus le ventre noué. Impossible de déterminer avec précision la cause d’un tel changement pour le moment.


Je n’ai plus peur de l’avenir. Pourtant, ma situation n’a jamais été aussi imprévisible. La confiance en soi n’est même plus une appréhension, elle n’est plus une préoccupation. Et lorsque je regarde le temps qui s’écoule, je suis serein.


Quelque part, je suis en colère, je suis tiraillé par cette liberté soudaine tant elle devrait être la norme alors qu’en réalité, c’est l’inverse que notre société encourage. Quand je repense à ma vie à CRAMOISY dans mon ancien appartement, j’accepte difficilement ces nombreuses années dans une terreur permanente, un rythme certainement responsable de mes problèmes de santé.


Courir après les minutes, payer des factures pour pouvoir, en fait, les payer de nouveau. Travailler pour être en mesure d’y retourner, partir en vacances avec le peu d’économies qu’il reste pour prendre une respiration avant de s’étouffer de nouveau d’une tasse de quotidien.


Cette boucle infernale est absurde, complètement folle. J’ai beau travailler depuis toujours dans mon domaine de prédilection : la création, mon activité professionnelle restait un non-sens, elle entretenait un cycle infernal usant.


Pourtant au travers de mon activité, j’espérais, peut être pourrais je échanger, créer un lien de confiance avec les personnes, tisser de belles amitiés, se revoir, diner ensemble, bref : Partager.
La réalité est différente.


Les rapports commerciaux rendent les gens méfiants, suspicieux. Que de déceptions pour comprendre qu’on ne peut pas être totalement soi-même dans un tel contexte. L’argent travestit les rapports commerciaux et la tendresse soulève le doute.


Est-elle faussement intéressée ou une faiblesse dont il faut profiter ? L’esprit marchand saisit n’importe quelle faille humaine pour s’en nourrir.


J’ai compris amèrement qu’il n’y avait aucune pitié dans cet univers. On peut bien me rappeler que ma vision est naïve, inconsciente ou encore immature.


Je regrette.


C’est le fonctionnement actuel qui me semble être ce dont on m’accuse. L’argent gangrène les gens. Art, service ou marchandise, qu’importe, le combat est le même.


Tout un chacun fait de son mieux, pour sa propre famille qu’il souhaite protéger, avec qui ils s’épanouissent. Dans la jungle, tous se défendent. Malgré mes reproches, j’ai été chanceux de rencontrer des gens formidables grâce à cette activité. Et je continuerais, mais vendre mes prestations sans rendre, ne me convient plus. Ma motivation est autre part.


Entre nous ? A quoi bon ? L’art est une valeur marchande comme une autre. Pourtant, dieu sait combien j’aime la création plus que tout au monde. Je ne peux éteindre cette flamme intime.
De nombreuses années, je planifiai des idées dans ma tête pour sortir du commerce, en vain. Il a d’abord fallu que je gagne ma vie, que je survive et subvienne à mes besoins. Je mentirais si je prétendais que ce fut simple d’y parvenir.


Toutes ces années, ma maladie m’agenouillant (rectocolite hémorragique) depuis l’âge de 16ans, j’ai guéri miraculeusement au cours du 1er confinement. J’ai du faire preuve de ténacité pour développer mon activité d’artiste auteur. Une fois la stabilité financière acquise, et guéri, j’ai perdu tout intérêt pour cette direction. Je ne me voyais pas vivre encore 30 ou 40 ans comme cela. Alors que faire ?


La lecture est un guide, PETITE de SARAH GYSLER m’a inspiré, une idée est née : Mon voyage. Ce livre a changé ma vie. Elle a envoyé valser toutes mes excuses et mon déni. J’ai imaginé un voyage où la création reprendrait sa superbe. Où je créerait sans aucune limite ni contrainte, si ce n’est celle d’apporter le maximum aux autres, de remettre le partage au cœur de ma vie, mettre au service de l’humain ma créativité.


L’écriture, La musique, La peinture. 3 domaines sans lesquels je ne peux pas vivre. Trouver ensuite le moyen de vendre mon travail afin de collecter des fonds pour des projets humanitaires. Tout cela est encore à travailler, à réfléchir, à structurer. Il va y avoir beaucoup de travail pour y parvenir.
Mon cœur meurt sans profondeur, je construit alors mon projet sur ce principe non négociable. Que l’humain en fasse partie intégrante et qu’à chaque euro dont je bénéficie, mes efforts apportent quelque chose aux autres aussi.


Mon idée m’intimide mais ne m’effraie pas car c’est la réalité : j’ai peur mais confiance dans ce sentiment de vie et lorsque je ferme les yeux tout est aligné.
Je crois en la bonté de l’être humain. Viscéralement.


Alors j’avance, je regarde le bout de la route, tenant mon volant avec force en sachant que je ne sais pas où j’irais. Chaque kilomètre en plus, chaque lettre écrite, chaque note composée me rassure. Je me rapproche du but et de vous.


Quel paradoxe d’être seul et pourtant de me rapprocher bien plus de vous qu’en métropole ?
La nuit est déjà tombée, l’humidité perle. C’est magnifique de simplicité. Demain, j’avancerais en direction de Faro.

Voilà mon seul horizon pour le moment.

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