



AU BORD D’UN LAC
9h56, Le 12/03/22
Quelle épreuve d’arriver à cet endroit ! Les routes éventrées, pleines de caillasses, la crainte d’endommager le dessous de la Mégane, d’arracher je ne sais quelle durite. Bref, ce n’est pas avec l’esprit détendu que j’arrive sur ce spot magnifique et silencieux.
Les terres rougeâtres donnent un caractère exotique appréciable en entourant l’eau accumulée par le barrage. Mon regard est surpris par ces arbres et ces teintes inconnues de ma terre natale.
Dans ce calme propice à la réflexion, à l’ascèse, que de prises de conscience chaque jour depuis le début de mon voyage. Hier soir, m’endormant sous un ciel étoilé, je réalisais le gouffre qui sépare l’idéal du réel. L’emprise sur la vie est un leurre.
La proportion prévisible de nos projections, face à l’imprévisible, est nulle. Partons, courrons vers nos rêves, il y a tout à découvrir, tout à apprendre, tout à échouer pour terminer nos vies comme des victoires.
Je me suis assis au bord des ondulations du lac en pleine nuit. j’ai vu l’insuffisance de l’homme se suffire. L’esprit se préoccupe du vital et le stress est un outil formidable, celui qui sépare le danger du dérisoire.
Les preuves sont là : Les éléments qui assurent la réussite de mon voyage dans mon véhicule fonctionnent à merveille. Et c’est bien ces éléments sur lesquels mes inquiétudes se sont penchées totalement. Et en cas de problèmes, je les connais si parfaitement, que l’obstacle éventuel sera rapidement résolu.
Je me répétait combien les dangers étaient grands et nombreux. Le flou prenait toute la place sur mon futur, que de craintes ! Que de nuits tendu d’oublier quelque chose d’essentiel.
Je mesure mon manque d’objectivité. Incapable de mesurer combien tout se déroulait bien. Aucun risque vital.
Quel était mon ennemi ? Le perfectionnisme. Il cherche l’impossible, ce n’est pas une quête de perfection, mais une tentative d’éviter l’échec à tout prix, C’est l’égo et ses foutaises.
C’est un puits sans fond : Impossible de ne pas échouer sans erreurs. La réussite et le progrès sont à ce prix. Se tromper, c’est se connaitre et déterrer nos ressources inconnues.
Je me réjouis de la tournure que prendra mon esprit après ce long périple en Europe. J’imagine déjà un tour du monde avec mon véhicule si atypique. J’ai quelques modifications éventuelles en tête pour l’optimiser. Améliorer le chauffage, son aération peut être meilleure. Je suis en quête d’une solution pour pomper le diesel directement dans mon réservoir de voiture. Je gagnerais l’espace et le poids d’un bidon de 10litres de diesel. SA présence dans mon coffre me déplait.
La problématique du Gaz aussi doit être solutionnée. Les cartouches à usage unique sont une ineptie. J’image une cartouche de taille moyenne en guise de réservoir qui pourrait alimenter grâce à un tube flexible clipsable à proximité du lieu où je cuisine, un foyer de cuisson. Je dois étudier la chose.
Les rangements aussi ne sont pas adéquat. L’accès est un peu laborieux, il y a la possibilité d’améliorer leur conditionnement après avoir mis à l’épreuve mes besoins quotidiens. J’en saurais plus dans quelques mois.
L’installation d’une climatisation devient urgente car les beaux jours arrivent. Je ne sais absolument pas de quelle manière je vais m’y prendre, je dois trouver une solution.
Un certain tri de l’ensemble de mes biens dans mon véhicule est indispensable. Je dois gagner du poids, environ 150kilos pour pouvoir rehausser le châssis de la voiture pour toucher un peu moins le sol pour les sentiers chaotiques.
Je vais me libérer de mon enceinte de mixage. Elle n’est indispensable. Je pourrais de cette manière revendre ma paire d’enceinte, et récupérer de l’argent pour financer mon voyage.
J’ai aussi un stockage maximal de 3 x 25 Litres d’eau. Ces 75 litres me semblaient si peu. En réalité, les circonstances permettent d’avoir de l’eau facilement. 25 litres suffisent amplement. Je vais donc circuler désormais avec environ 40litres d’eau, récupérer le bidon vide de 25 litres dans l’Oise et laisser vide les 60 litres restant. De cette manière, je pourrais en cas de campement de longue durée, bénéficier d’une autonomie conséquente, environ 1 mois. Je tiens environ 1 semaine avec 25 litres.
J’ai emmené de nombreux livres, surement trop. Il y a aussi des cahiers pour étudier qui prennent trop de place et de poids. En ce qui concerne mes nuits, le sac de couchage grand froid que j’ai acheté sur leboncoin est merveilleux. Il tient chaud à tel point qu’un sac de couchage suffit. Je garde donc le deuxième sac pour les situations extrêmes. Si je dois dormir en montagne en hiver par exemple. La couette du coffre de toit me semble trop encombrante et inutile. Le temps me le confirmera.
Il sera nécessaire que j’améliore le rangement de mes outils de travail quotidien : Mes 2 ordinateurs, les câbles de chargement, mon casque de musique, mes chargeurs. Je suis contraint pour le moment de ranger l’intégralité de mon bureau souvent dans un sac spécial. C’est contraignant. Des emplacements alloués dans une étagère conçue sur mesure seraient merveilleux.
J’envisage d’acheter 1 chargeur supplémentaire pour chaque ordinateur. De cette manière, lorsque je m’en sers en dehors de la voiture, je n’ai pas besoin de les débrancher. Je gagnerais en confort en ayant 2 chargeurs fixes dans le véhicule.
Il va de même pour la cuisine : Des emplacements alloués pour chaque outil seraient parfaits et me feraient gagner du temps.
Cette aventure ne sera jamais terminée, il y aura toujours quelque chose à améliorer, et c’est justement tout son principe : tendre vers l’inconnu, s’émerveiller de la nouveauté et des épreuves inattendues, les franchir et se découvrir.
La bruine caresse le lac et la carrosserie de la Mégane crépite sous les gouttelettes. L’horizon est d’un gris brumeux et je me sens léger, je sonde mon ressenti, je me sens bien.
Mon bonheur est en accord avec mes principes intérieurs. Ma souffrance passée naissait du désaccord profond entre mes actions quotidiennes et mes aspirations. Je reconnais que mon intuition était juste depuis trop longtemps. Le premier soupir aurait dû m’alerter. En réalité, il l’a fait, mais je n’ai pas voulu l’écouter.
Trop effrayé par le monde et les informations toxiques, l’argent, la sécurité, le qu’en dira-t-on, la pression sociale, les attentes d’autrui.
C’est la lourdeur d’une liste interminable qui devrait nous alerter.
La vie moderne atrophie l’attention. Les sollicitations sont si nombreuses que l’esprit se perd, et s’épuise. On rentre chez soi essoufflé.
Il m’a fallu une décennie pour stopper cette folie et seul l’avenir me dira si ce choix était le bon.